Habiter son corps autrement : quand la neuroatypie et le handicap redéfinissent les frontières du sensible – par Laura Stromboni-Couzy (@MyDearVagina).
Explorer la réconciliation corporelle à travers le toucher, la sensorialité et le mouvement pour que chaque corps puisse se sentir chez soi.
Le corps, ce territoire à apprivoiser
Il y a des corps qu’on commente, qu’on félicite, qu’on répare.
Et puis, il y a ceux qu’on ne comprend pas toujours. Ceux qui frémissent au moindre bruit, qui sursautent à un contact, ou qui semblent parfois absents à eux-mêmes.
Pour beaucoup de personnes neuroatypiques ou en situation de handicap, le corps n’est pas un simple véhicule : c’est un territoire complexe, plein de signaux contradictoires, de surcharges et de silences.

Quand le monde valorise la norme sensorielle celle du “ni trop, ni trop peu” comment apprendre à aimer un corps qui vit autrement ?
J’aimerais ouvrir ici une réflexion sur la réconciliation corporelle : redécouvrir le toucher, la sensorialité et le mouvement non pas comme des thérapies, mais comme des chemins de réconciliation avec soi-même.
Parce que s’approprier son corps, c’est aussi se donner le droit de le vivre à sa manière.
Quand le corps devient un terrain d’incompréhension
Certain·es d’entre nous se souviennent du moment où leur corps est devenu un terrain d’incompréhension.
Pour les personnes au vécu sensoriel atypique, ce moment arrive souvent tôt : quand on leur demande d’“arrêter de bouger”, de “tenir en place”, ou de “faire comme les autres”.
Mais comment faire comme les autres quand le corps ressent tout… différemment ?

Je me souviens qu’à l’école, on me disait toujours de ‘tenir en place’. Moi, bouger, ça m’aidait à me concentrer.
Mon corps a toujours été trop visible, trop présent. J’ai mis des années à comprendre que c’était juste ma manière à moi d’être.
Témoignage anonyme, personne autiste, 29 ans.
Ce rapport ambivalent au corps est souvent accentué par la société : on apprend à se conformer à un modèle corporel “valide”, calme, coordonné, silencieux.
Pourtant, pour beaucoup, les stims, ces gestes répétitifs qui apaisent, le balancement ou le mouvement constant sont des formes d’équilibre.
Mais la norme sensorielle ne laisse pas toujours de place à ces corps qui ressentent autrement.

Vivre dans un monde calibré pour d’autres systèmes sensoriels, c’est aussi vivre dans un corps qu’on doit sans cesse traduire : trop de lumière, trop de bruits, trop de tissus, trop de contact.
Le corps devient alors un espace d’adaptation permanente. Et parfois, on finit par s’en détacher, par ne plus trop savoir où on habite.
Le toucher : entre refuge et inconfort
Le toucher, c’est souvent un paradoxe. Il peut apaiser ou agresser, réconforter ou épuiser.
Certain·es cherchent le contact comme une ancre, d’autres le fuient parce qu’il surcharge leurs sens.
Et ça n’a rien à voir avec la volonté : c’est une réalité corporelle.

J’ai une paralysie partielle du côté droit. Quand quelqu’un me touche sans prévenir, je peux avoir une réaction de rejet assez forte. Mais les massages que je choisis, les pressions que je contrôle, ça, c’est un vrai réconfort. J’ai appris à apprivoiser le contact, à mon rythme.
Témoignage anonyme, personne en situation de handicap moteur, 42 ans.
Pour se réapproprier le toucher, il faut souvent retrouver la possibilité de choisir.
De décider quand, comment et par qui le contact est possible.
C’est pour cela que les outils sensoriels peuvent devenir de vrais alliés : ils ne sont pas des gadgets, mais des supports d’exploration et de régulation.

Parmi les ressources proposées par Hop’Toys, on trouve les Carrés tactiles, pour (re)découvrir des textures variées et stimuler la curiosité sensorielle, ainsi que les Balles sensorielles tactiles, parfaites pour le massage, la manipulation et la modulation sensorielle.

Ces objets permettent une médiation corporelle bienveillante, un pont entre soi et le monde.
Le toucher redevient un espace d’expérimentation, un terrain de confiance à reconstruire.
On peut apprendre à aimer ce que l’on sent, à redonner au contact un sens choisi pas subi.
Réapprendre à écouter ses sensations
Pour beaucoup, le corps est un territoire brouillé.
Certain·es ne sentent pas la faim, la fatigue ou la douleur tant qu’elle n’explose pas.
Cette perception des signaux internes, appelée interoception, est souvent altérée chez les personnes neuroA ou certaines personnes en situation de handicap.

Pendant longtemps, je ne sentais pas la fatigue. J’attendais que mon corps ‘crie’ avant de réagir.
Les exercices d’interoception m’ont aidée à capter les signaux plus tôt, à comprendre ce que mon corps essaie de me dire sans me crier dessus.
Témoignage anonyme, personne neuroA, 24 ans.
Réapprendre à écouter son corps peut passer par des gestes simples : s’étirer, respirer, se balancer, marcher pieds nus, explorer des textures.
Les tapis tactiles et planches d’équilibre Hop’Toys favorisent cette reconnexion : ils permettent de ressentir la stabilité et la gravité de manière ludique.
Les couvertures lestées, elles, apportent un sentiment d’ancrage et de sécurité corporelle.
Et pour explorer le geste autrement, le Gel Happy Senso transforme l’exploration tactile en expérience artistique : manipuler, écouter, ressentir.

Ces petites pratiques redonnent au mouvement une fonction essentielle : ressentir pour se connaître.
Le corps n’est plus une contrainte, il devient un espace d’expression.

L’autodétermination corporelle : reprendre le pouvoir sur son corps
Se réconcilier avec son corps, c’est retrouver un lien choisi, apaisé, actif.
L’enjeu, c’est l’autodétermination corporelle : la possibilité de choisir comment on vit son corps, ce qu’on montre, ce qu’on cache, comment on bouge, comment on se repose.

Quand j’ai commencé à utiliser une canne colorée, on m’a dit que ça ‘attirait trop l’attention’.
Mais moi, j’en avais marre de me cacher. Aujourd’hui, c’est un accessoire qui fait partie de mon style.
C’est une façon d’habiter mon handicap sans honte, de dire : voilà, c’est mon corps, c’est moi.
Témoignage anonyme, personne en situation de handicap visuel, 35 ans.
L’autodétermination passe par des petits gestes du quotidien : choisir ses vêtements selon leur confort sensoriel, décider des limites du contact, créer des espaces sûrs où le corps n’est pas jugé.
C’est aussi revendiquer le droit à la sensualité, au plaisir, à la curiosité corporelle des dimensions souvent taboues, voire niées, aux personnes dont le corps ou les sens ne rentrent pas dans la norme.
Retrouver du plaisir à ressentir, c’est refuser le modèle d’un corps “à réparer”.
C’est affirmer : mon corps est complet, même s’il ne rentre pas dans la norme.
Se réconcilier, c’est créer son propre langage corporel
Apprendre à habiter son être, c’est un chemin fait d’essais, de fatigue et de découvertes.
Certain·es se reconnectent à travers la danse libre, d’autres par la respiration ou simplement par le repos.
Ce n’est pas une histoire d’acceptation forcée, mais de dialogue intime.

Se réconcilier avec son corps, ce n’est pas s’y conformer : c’est inventer sa propre façon d’y vivre.
Celle des mouvements qui apaisent, des textures réconfortantes, des gestes choisis.
C’est alors créer un langage corporel personnel, où le toucher, les élans et la sensorialité deviennent des moyens de se connaître pas de se corriger.
Dans un monde obsédé par la performance, apprendre à écouter son corps est un acte de résistance.
Nos corps, tous différents, nous rappellent que ressentir est une force.
Et que la vraie réappropriation commence là : dans la douceur, la curiosité et la liberté d’être soi.
Et si habiter son corps, finalement, c’était simplement apprendre à s’y sentir bien ?
Article rédigé par Laura Stromboni-Couzy pour Hop’Toys, autrice et créatrice du compte Instagram @MyDearVagina
http://www.laurastromboni.com/
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