Pour les personnes porteuses de handicaps, qu’il soit psychique ou physique, il peut être difficile d’avoir un parcours de soin dit « classique ». À Montpellier, nous nous sommes rendus au sein des locaux de Propara, le centre de rééducation neurologique. Dans ce centre, se trouve Handiconsult34. Il s’agit d’un centre de soin pour les personnes en situation de handicap. Découvrons ces spécificités ensemble avec Michel Delcey, le directeur du centre.

Propara et HandiConsult34

Chez Propara et Handiconsult34, avez-vous connaissance des profils sensoriels avant leur visite ?

En amont, nous transmettons une fiche de liaison, qui est à compléter en amont de la visite. Cela permet aux équipes de prendre connaissance des spécificités sensorielles des patients. La désensibilisation des patients se fait par des objets du quotidien ou avec le matériel médical à disposition. Il y a surtout une approche relationnelle et de confiance qui se crée.

Le parcours et l’accompagnement sont adaptés à chaque patient. Par la fiche de liaison remplie en amont par les accompagnants qui permet aux infirmières d’adapter la prise en charge. Apporter des objets du quotidien, adapter le parcours, éteindre les lumières (particulièrement agressives…), etc… Elles font un accompagnement très personnalisé, qui varie avec chaque patient et à chaque consultation.

Comment communiquez-vous sur la douleur avec les patients lorsqu’ils sont non verbaux ? 

L’adaptation à la douleur se fait davantage grâce à l’accompagnant qui connait bien le patient ainsi que la fiche de liaison qui a été transmise en amont. La communication passe de plus en plus par les pictogrammes et du séquençage. C’est très pratique en fonction du patient en face. Au moins, c’est quelque chose qui sera facile à comprendre.

Chez HandiConsult, le personnel utilise aussi du « gaz hilarant », aussi connu sous le nom de Meopa. Pour limiter la douleur mais aussi et surtout le stress! En amont nous administrons également du Doliprane aux patients.

De quelle manière abordez-vous les besoins de « prédictibilité » des patients ? Comment les parents préparent-ils les visites ? 

Nous organisons des visites blanches, mais nous les invitons aussi à consulter des fiches de santé, pictogrammes, application de bruit (imitation des bruits des machines dentaires par exemple) pour qu’ils préparent leurs proches.

Nous utilisons également des timers. Mais surtout sur les téléphones, car nous avons besoin de durée déterminée très courte, d’environ 10 secondes.  Cela permet aux patients de se rendre compte du temps de traitement.

Par quel moyen gérez-vous les transitions dans le parcours ? Les temps d’attente ?

En ce qui concerne le temps d’attente, il est limité avec une prise en charge d’un patient à la fois. Leur principe : c’est le médecin qui attend pas le patient !  Il y a rarement une double vacation ou alors ce sont pour des soins différents et donc le parcours et la prise en charge est totalement différent.  De ce fait, les patients ne se croisent quasiment jamais entre eux.

Les transitions sont plutôt fluides car elles sont accompagnées de A à Z. Les patients en général viennent visiter avant de faire les soins. C’est ce qu’on appelle des visites blanches. Ils font le parcours entier sans faire les soins, juste pour voir ce que c’est exactement. Ils sont donc déjà un peu familiarisés.

Avez-vous fait l’expérience ou avez-vous connaissance de moment de rupture ou de difficultés dans l’expérience des patients ?  Et comment y faites-vous face ?

L’objectif est d’accompagner et s’adapter à chacun. Ici, le but est: « de toujours terminer sur une note positive, même si le soin n’a pas pu être mené à bien. » Le patient peut revenir si il faut couper court. Bref, le rendez-vous se termine toujours sur « une bonne note ».

Les infirmières identifient principalement des ruptures sur certaines étapes du soin (exemple du garrot pour les prises de sang, leur solution : utiliser un foulard…) Cependant, le centre dispose d’une salle de « refuge », où de nombreux objets sensoriels, et des fidgets sont mis à dispositions des patients.

Mais il y a une aussi une ferme pédagogique dans l’établissement! Ce qui peut aider pour certains patients. Michel Delcey se rappelle une anecdote: « Un enfant qui ne voulait pas se faire faire une prise de sang a été amené à la ferme pour se calmer. Là-bas, il a immédiatement accepté la prise de sang! »

HandiConsult34 et Propara

Comment sont pris en compte les besoins et choix des patients dans une optique d’auto-détermination ? Comment les procédures sont expliquées ?

Si les patients entrent dans une phase de stress ou de crise, ou que leurs aidants ressentent que la crise peut arriver, explique Michel: « les soins sont arrêtés et repris lors d’une prochaine séance. »

Les procédures sont expliquées ou bien avec des pictogrammes si le profil cognitif le permet, sinon les équipes font des mises en situation. Par exemple, elles miment les soins l’une sur l’autre ou sur l’aidant en montrant les instruments, le bruit qu’ils font, etc…

Les infirmières, sont particulièrement engagées dans le fait de ne pas brusquer les patients (ni leurs proches), et de faire de cette expérience une réussite. Il faut qu’il n’y ait aucun blocage au fait d’arrêter une visite ou un soin et recommencer plus tard, ou a utiliser d’autres méthodes…

Y a-t-il une typologie de patients qui sont plus difficiles à accueillir actuellement ?

Bien qu’il n’y ait pas de typologie de patients en particulier, les infirmières se forment à l’accueil de patients TSA et souhaitent que chaque praticien soit aussi formé à l’accueil des patients. Lors de notre visite, l’une des infirmières était par ailleurs en formation.

Les médecins sont des « volontaires », ils ne sont pas formés à la prise en charge des personnes TSA. Cependant, le directeur précise: « Ils ont une appétence pour l’accompagnement des patients aux besoins spécifiques. »

Le centre fait appel à une formatrice qui s’appelle Béatrice Verney qui vient les former sur place, et qui fait aussi des séances d’observations de leurs pratiques pour leur donner des pistes et conseils concrets. Les praticiens devraient bientôt être aussi formé à la prise en charge.

Les familles viennent-elles avec leurs autres enfants ?

D’après Michel Delcey, le président du centre: « Il n’y a pas de limite sur les accompagnants. » Cela peut souvent être bénéfique pour les patients.

« Le fait que les parents ne peuvent pas faire garder leurs autres enfants, peut être un frein », explique l’une des infirmières présente.. De ce fait, la présence de la fratrie est acceptée par l’équipe. Même si cela peut créer une charge supplémentaire de travail.

Est-ce que chaque pro met en place son parcours et ses supports ou est-ce que c’est mutualisé ?

Au niveau de Handiconsult 34, Ce ne sont pas les praticiens qui créent les parcours et supports. Ce sont les coordinatrices qui conçoivent et créent les supports. De ce fait, il s’agit souvent de supports « faits maison » et mis en commun entre elles.

Les parcours sont propres aux soins et aux patients, on ne peut donc pas généralisé un parcours aussi personnalisé. Néanmoins, comme il s’agitun projet pilote, les coordinatrices développent une plateforme informatique de traitement des dossiers des patients qui a vocation à être décuplé tout comme leur modèle.

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