Pourquoi parle-t-on de mémoire de travail ? En quoi se distingue-t-elle de la mémoire au sens où nous la connaissons ? Que se passe-t-il lorsqu’elle est défaillante ? Pour en savoir plus, nous avons recueilli des extraits du livre de Gérald Bussy, docteur en neuropsychologie, 100 idées pour stimuler sa mémoire de travail, aux Éditions Tom Pousse.

La mémoire ou les mémoires ?

Dans le langage commun, on parle habituellement de LA mémoire. Or, nous devrions parler DES mémoires, car il existe plusieurs systèmes mnésiques distincts les uns des autres malgré les liens qui les unissent (Eustache et Desgranges, 2008). On distingue notamment la mémoire à long terme (MLT) et la mémoire à court terme (MCT), qui reçoivent les informations en provenance de nos sens (mémoire perceptive).

La mémoire sémantique

Au sein de la mémoire à long terme, on identifie la mémoire sémantique et la mémoire épisodique. La mémoire sémantique est la mémoire des connaissances que nous avons sur le monde, sur nous-mêmes… Par exemple, savoir qui était Charlemagne, connaître la capitale du Japon, savoir que je suis né un vendredi… Ces connaissances ne peuvent pas permettre de faire un « voyage mental » dans le temps pour se souvenir du moment précis où l’information nous a été donnée.

La mémoire épisodique

À l’inverse, la mémoire épisodique est la mémoire des faits, des événements de vie dans lesquels on peut se voir agir. Par exemple, on est capable de décrire précisément des moments de son mariage ou de la naissance de son enfant…

La mémoire procédurale

Un autre type de mémoire à long terme est la mémoire procédurale, qui est une mémoire qui n’a pas besoin d’être consciente, car elle repose sur des automatismes. Celle-ci renvoie aux informations relatives aux procédures cognitives et motrices, par exemple, savoir faire du vélo. En effet, une fois qu’on a appris à faire du vélo, cela se fait automatiquement sans qu’on ait besoin de réfléchir à la façon de faire.

Parallèlement à ces systèmes mnésiques à long terme, il existe des systèmes de mémoire qui ne servent à retenir les informations que pendant un laps de temps relativement court. On appelle cela la mémoire à court terme ou plus habituellement la mémoire de travail (MDT).

Le jeu Atelier Luditab pour la mémoire de travail

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Comment se développe la mémoire de travail ?

Chaque enfant se développe à son propre rythme, quels que soient les domaines, et ce, bien souvent, de manière désynchronisée (tout ne se développe pas à la même vitesse). Cet axiome est aussi valable pour la mémoire de travail. Tous les enfants n’ont pas les mêmes capacités de mémoire de travail au même âge, sans que cela ne rentre nécessairement dans la catégorie des troubles. Même à l’âge adulte, nous n’avons pas tous les mêmes capacités mnésiques.

Étapes de développement de la mémoire à court terme

Les différentes composantes de la mémoire de travail ne se développent pas à la même vitesse. Un enfant retient (MCT verbale) environ 2 éléments à 2 ans, 5 éléments à 7 ans, 6 éléments à 9 ans et les performances adultes (environ 7 éléments) sont atteintes à l’adolescence. Ainsi, en quelques années, les capacités mnésiques sont multipliées par trois. Les données scientifiques concernant la MCT visuospatiale sont moins nombreuses et relativement variables. Il semblerait que le développement de la MCT visuospatiale soit plus tardif (5-6 ans) que celui de la MCT verbale (Gaonac’h et Pross, 2005). Toutefois, les performances adultes sont atteintes, en moyenne, vers l’âge de 11-12 ans environ.

Concernant la mémoire de travail, le développement est lent et tardif et suivrait une évolution en plateau plutôt que linéaire, avec des pics vers 4-5 ans et vers 8 ans (Luciana et Nelson, 1998). Il est difficile de donner des chiffres concernant les aptitudes, tant les performances dépendent des tâches utilisées pour évaluer la mémoire de travail.

Qu’est-ce qui détermine son développement ?

Les déterminants du développement de la mémoire de travail sont multiples. Certains auteurs évoquent une augmentation de la vitesse de traitement de l’information (plus on traite vite les informations dans un temps donné, plus on traite d’informations) ou encore de l’amélioration des capacités d’attention avec l’âge. Évidemment, le développement de l’efficacité de la mémoire de travail dépend également des capacités de mémoire à long terme. Or, avec l’avancée en âge, les connaissances et savoirs stockés en mémoire à long terme s’enrichissent considérablement. Si les informations à mémoriser en mémoire de travail sont connues et familières (donc présentes en mémoire à long terme), il sera plus facile de les retenir que des informations jamais rencontrées auparavant.

Influence des stratégies utilisées

Le développement des composantes de la mémoire de travail est également dépendant des stratégies utilisées. C’est le cas, par exemple, de la stratégie d’auto-répétition subvocale (qui consiste à répéter dans sa tête les informations pour ne pas les oublier) qui n’apparaît que vers l’âge de 7 ans. Certains auteurs stipulent que le développement de la mémoire de travail est purement quantitatif jusqu’à l’âge de 6 ans puis devient également qualitatif (Gathercole, 1999).

Avec l’expérience, les individus peuvent également utiliser les stratégies de regroupement des informations (ex. : si vous devez mémoriser 1-8-7-9-4, vous pouvez regrouper en 18-794, ce qui correspond à ne retenir que deux informations, 18 et 794, au lieu des cinq chiffres), d’associations des informations (ex. : si vous devez mémoriser chat-maison-souris-fenêtre, vous pouvez construire une histoire comme « le chat court après la souris dans la maison, puis elle s’échappe par la fenêtre ») ou d’imagerie mentale (= visualiser dans sa tête les informations données verbalement).

Ainsi, le développement de la mémoire de travail se fait sur un plan quantitatif, mais également sur un plan qualitatif, avec l’apparition progressive de nouvelles stratégies. À un âge avancé, les capacités en mémoire de travail commencent à décliner lentement.

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Quels sont les troubles de la mémoire de travail ?

Chez l’enfant

De nombreuses personnes (enfants ou adultes) présentent une atteinte d’une ou plusieurs composantes de la mémoire de travail. Souvent (notamment chez les enfants), ces atteintes sont associées à d’autres troubles cognitifs. Chez l’enfant, on retrouvera des troubles de la mémoire de travail chez la majorité des enfants dysphasiques, dyslexiques, dysorthographiques, dyspraxiques, avec Trouble du Déficit de l’Attention avec/sans Hyperactivité (TDA/H), déficience intellectuelle ; et dans une moindre mesure chez certains enfants autistes, épileptiques.

Chez l’adulte

Il est évident que les adultes ayant présenté enfants un trouble du neurodéveloppement se manifestant par un trouble de la mémoire de travail, garderont ce trouble si rien n’a été entrepris pour le rééduquer. Ainsi, on retrouve des troubles de la mémoire de travail chez des adultes déficients intellectuels, des adultes dyslexiques, des adultes TDA/H. Parallèlement, certaines pathologies acquises à l’âge adulte peuvent s’accompagner d’un trouble de la mémoire de travail, dont bien évidemment une lésion cérébrale ou un accident vasculaire cérébral se produisant dans l’une des zones du cerveau dédiées à la mémoire de travail. On note également des troubles chez les personnes présentant une schizophrénie, les personnes ayant eu un cancer traité par chimiothérapie (chemo brain, en anglais) ou encore un trouble neurocognitif majeur de type maladie d’Alzheimer par exemple (nouvelle terminologie pour parler de démence).

En résumé, il existe de nombreuses pathologies qui s’accompagnent d’une atteinte plus ou moins importante de la mémoire de travail. Cela mérite donc toute l’attention des professionnels, car comme nous allons le voir, il est possible d’entraîner ce système mnésique, voire de le rééduquer dans certains cas.

Un homme âgé se tient la tête

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Et vous ? Vous considérez avoir une bonne mémoire ? Quels sont vos tips pour tout retenir ? Dites le nous en commentaire !

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