Le 8 septembre 2020, nous avons eu la chance de recevoir Marie Ruffier-Bourdet, ergothérapeute spécialiste en troubles de l’alimentation en pédiatrie. Avec elle, nous avons animé un live sur Instagram. Marie nous a expliqué des notions essentielles à garder à l’esprit sur les troubles de l’alimentation et vous a donné ses conseils et astuces d’experte pour vous aider au quotidien. Découvrez dans cet article une synthèse des points clés abordés pendant cet atelier online. Bonne lecture ! 

Troubles de l’alimentation : un syndrome, plusieurs termes !

Quel terme utiliser ? En France, il existe de nombreux concepts ou dénominations autour des troubles de l’alimentation : syndrome de dysoralité sensorielle, troubles de l’oralité, troubles de l’oralité alimentaire, troubles de l’alimentation, néophobie alimentaire… En quoi consistent-ils ?

Quand nous parlons de troubles de l’oralité alimentaire, nous parlons de troubles de l’alimentation. Ce sont des synonymes. « Troubles de l’alimentation » est la traduction française du concept anglo-saxon « feeding disorder »  et, après consensus, c’est le terme choisi et utilisé par les ergothérapeutes formateurs en France. L’idée est d’utiliser la même nomenclature que dans d’autres pays à l’international, notamment au Canada ou aux États-Unis.

Comment se caractérisent ces troubles ?

D’après Marie Ruffier-Bourdet, le trouble de l’alimentation se caractérise par le refus de manger certains groupes alimentaires, certaines textures, certains solides ou liquides pendant une période d’au moins un mois, entraînant une perte de poids, de croissance ou un retard de développement.

Il peut se manifester par :

  • Du dégoût
  • Une hypersélectivité alimentaire
  • Le refus des morceaux
  • Le refus de certaines textures, couleurs…

Tous ces éléments créent chez l’enfant un panel alimentaire très restreint. Les experts parlent de troubles de l’alimentation quand le panel alimentaire d’un enfant de plus de 2 ans compte moins de 30 aliments distincts.

Un bébé qui refuse de manger

Quels signes peuvent alerter sur d’éventuels troubles de l’alimentation ?

On a tendance à penser que l’hypersensibilité est une critère sine qua non des troubles de l’alimentation. Pourtant, ce n’est pas un signe diagnostic de troubles de l’oralité alimentaire en pédiatrie.

Les signes d’un éventuel trouble de l’alimentation sont : l’enfant ne mange pas, il mange peu, il est sélectif, les repas sont impossibles, il perd du poids.

Les difficultés d’alimentation apparaissent quand il y a eu une rupture dans le développement de l’enfant :

  • Troubles organiques : il ne peut pas manger pour une raison fonctionnelle (troubles de la déglutition ou de la motricité),
  • Sensoriels : qui empêchent l’enfant d’utiliser ses sens pour manger et développer son alimentation,
  • Fonctionnels : il ne sait pas comment faire,
  • Psychogènes et comportementaux : il refuse de le faire et/ou appréhende de le faire.

Les troubles de l’alimentation et le trouble d’intégration sensorielle ?

L’intégration sensorielle

D’après la docteure américaine Anna-Jean Ayres, l’intégration sensorielle est la capacité à sentir, comprendre, organiser et moduler les informations provenant de notre corps et de son environnement afin d’y répondre de manière adaptée. Comme Isabelle Babington l’explique dans son livre L’enfant EXTRAordinaire, il y a un trouble de l’intégration sensorielle quand le système nerveux de l’enfant est incapable de trier, réguler, comparer et/ou utiliser les informations provenant de ses sens pour fonctionner de façon fluide dans sa vie quotidienne.

Quel lien avec l’alimentation ?

Comme Marie Ruffier-Bourdet nous l’explique, l’action de manger est sensorielle. C’est-à-dire que, pendant que nous mangeons, nous utilisons nos sens : nous regardons l’aliment, nous le touchons… et l’aspect proprioceptif est également sollicité selon le type d’aliments. C’est le système sensoriel qui va s’adapter à donner une réponse ajustée. Par exemple, nous ne mâchons pas de la même manière une crevette et une noix de cajou, il faut un ajustement.

Concrètement, il y a 3 points de l’intégration sensorielle qui interviennent dans l’alimentation :

  • Les troubles de la discrimination sensorielle : « J’ai du mal à percevoir ce qui se passe dans ma bouche quand j’ai d’autres choses autour de moi. »
  • Les troubles de la modulation sensorielle, qui se présentent soit avec une hyposensibilité : « Je ne ressens pas assez bien dans ma bouche », ce qui induit un risque d’étouffement, de mal mâcher, de ne pas pouvoir manger tous les morceaux. Soit avec une hypersensibilité « Je ne tolère rien dans ma bouche. »
  • Et les troubles moteurs d’origine sensorielle : « Je ne perçois pas, je ne discrimine pas bien. Je ne peux donc pas pas faire la différence entre un morceau de carotte et un morceau de steak. Par conséquent, ma réponse motrice ne sera pas bonne pour m’alimenter correctement. »

Il y a donc bien un lien direct entre les troubles de l’alimentation et le trouble d’intégration sensorielle, ce qui ne signifie pas pour autant que tous les troubles de l’alimentation soient un trouble d’intégration sensorielle. En revanche, quand l’enfant présente un trouble d’intégration sensorielle, il est assez fréquent qu’il ait un trouble d’alimentation associé.

Un enfant mange

>> Continuer à lire sur l’intégration sensorielle

Vers quel professionnel se tourner ?

Marie Ruffier-Bourdet regrette que, en France, les professionnels formés ne soient pas assez nombreux. Quoi qu’il en soit, ce qui importe n’est pas tant la casquette ou la spécialisation du professionnel, mais plutôt sa formation : ergothérapeutes, orthophonistes, pédiatres, diététiciens, psychomotriciens, kinésithérapeutes spécialisés dans les troubles de l’alimentation.

Le trouble de l’alimentation en pédiatrie sera d’ailleurs pris en charge par plusieurs professionnels de santé. Selon Marie Ruffier-Bourdet, la meilleure solution est d’avoir une équipe pluridisciplinaire autour de l’enfant. Les professionnels doivent travailler en partenariat avec les parents et les enfants pour réussir et améliorer son expérience d’alimentation.

De même, Marie Ruffier-Bourdet rappelle l’importance de l’intervention précoce avant l’âge de 2 ans, vitale pour une bonne prise en charge.

Plus on le prend tôt, mieux c’est. Dès qu’il y a une inquiétude parentale, il faut l’écouter et ne pas hésiter à consulter un professionnel.

Revoir le live

Si vous avez manqué ou souhaitez revisionner cet atelier organisé sur Instagram live, n’hésitez pas à le regarder en replay !

Découvrir les outils indispensables pour les troubles de l’alimentation

Pour retrouvez les 10 conseils de Marie Ruffier-Bourdet et (re)voir le deuxième live du 14 octobre 2020, c’est par ici !

Article publié le 11 septembre 2020. Mis à jour le 25 juillet 2022.


Marie Ruffier-Bourdet est ergothérapeute, diplômée en 2005 de l’école de Créteil. Elle propose des formations sur l’alimentation du bébé et les troubles de l’alimentation en pédiatrie. Elle a été très vite plongée dans l’univers de la pédiatrie, dès le début de son activité. Marie accompagnait en effet des enfants avec un polyhandicap au sein d’un SESSAD. Elle a été confrontée à la problématique des difficultés alimentaires. Elle a donc dû rapidement se questionner et chercher des réponses et des formations.

Vous pouvez la retrouver sur son site www.ergomums.com, où elle propose des articles, des accompagnements pour les parents, mais aussi des webinaires pour les spécialistes de la petite enfance et de la santé. Elle propose sur les réseaux sociaux une vulgarisation des formations autour du développement sensori-moteur du bébé et de l’alimentation entre 0 et 2 ans.

Retrouvez-la sur Instagram : @ergomums.

Responsable de projets stratégiques et innovation chez Hop'Toys

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