Les AVS, auxiliaires de vie scolaire, sont des assistants d’éducation spécialisés dans l’accompagnement scolaire d’enfants ou d’adolescents en situation de handicap. Nouvellement nommé AESH (Accompagnant des élèves en situation de handicap), nous avons voulu mettre en lumière ce métier pour mieux comprendre leur quotidien et leur rôle déterminant dans l’apprentissage des enfants exceptionnels via une série de portrait. 

Découvrez ci-dessous celui de Marie-Paule, 34 ans, maman d’un enfant différent, Romain, qui a 9 ans 1/2 et qui est atteint d’un handicap moteur à cause d’une maladie invalidante une myopathie.

Depuis quand exercez-vous le métier d’AVS et quelle formation avez-vous suivi ?

Quand j’ai arrêté de travailler une année pour m’occuper de mon fils j’ai très vite éprouvé le besoin de reprendre une activité pour ne pas être que plonger dans « sa » maladie. J’ai très vite monté une association en faveur du handicap à l’initiative de mes amis qui ont une petite fille malade eux aussi. Cette association étant très active j’ai éprouvé le besoin de m’épanouir à un niveau semblable professionnellement parlant.

C’est pourquoi demandeuse d’emploi j’ai souhaité me renseigner sur les critères exigés pour devenir AVS. A ma grande surprise il n’y en avait que deux : avoir son bac et être au chômage depuis au moins 1 an … Ouf, je rentrais dans les deux critères, mais aucune exigence de diplôme ou formation dans le domaine. Pour ma part ayant 3 diplômes dans le domaine de l’enfance (CAP, BEP et BAFA) ainsi que le BAC et mon expérience personnelle je rentrais selon moi dans les critères, mais visiblement ça n’avait pas plus d’importance que ça pour mon embauche.

Qui avez-vous accompagné et qui allez-vous accompagner l’année prochaine ?

J’ai tout d’abord été embauchée par un collège privé et exercé mes débuts en tant qu’AVS pendant deux ans dans la même école. Les débuts ont été compliqués car étant embauchée par l’école et non par l’Inspection Académique je n’ai pas eu d’enfants attitrés avec notification mais je me suis occupée un peu à gauche et à droite de plusieurs enfants à la fois les premiers mois.

Mais je retiendrais de ces deux ans surtout les deux enfants dont j’ai été l’AVS  « officielle » après 6 mois dans l’établissement et avec qui j’ai pu réellement faire un bout de chemin ensemble pour leur intégration dans le milieu ordinaire : une petite puce de 7 ans maintenue en grande section de maternelle avec un retard global, des difficultés moteurs et cognitifs et un jeune garçon de 9 ans avec des troubles du comportement et des difficultés d’ordre DYS.

En deux ans j’ai vue particulièrement progresser ces deux enfants, chacun selon leurs capacités et leur difficultés mais quel bonheur de pouvoir leur apporter quelque chose en plus qui les aident à s’intégrer dans ce milieu « ordinaire ».

Comment se passe une journée type ?

Les journées commencent toutes par l’accueil de l’enfant plus ou moins chaleureux selon les troubles. La matinée se passe au rythme du programme de l’enseignant avec les adaptations à prévoir pour l’enfant (pause pour se détendre, travail avec temps réduit pour des soucis de concentration, etc).

A midi le jeune garçon mangeait tout seul à la cantine, car le nombre d’heures lui étant accordé sur deux jours ne lui donnait pas droit à une AVS sur ce temps-là et la petite fille je l’accompagnais sur le temps de la cantine, le besoin d’une AVS ayant été considéré nécessaire pour l’aider.

Les après-midi se passaient difficilement pour le petite garçon qui au retour de la cantine sans adultes individuellement à ses côtés pendant le repas, rencontrait des difficultés liés à ses troubles. La petite puce elle se retrouvait une heure sans moi (le temps de ma pause) dans la classe. Ce temps finalement lui permettait alors d’être plus en groupe.

L’après-midi se passait au rythme de la classe avec leurs adaptations. Il faut dans la mesure du possible que ces enfants passent une journée type comme les autres enfants, avec bien sur les adaptations nécessaires : temps de travail réduit, ne pas faire de sport, sieste, petit groupe, etc…

Quelle est votre relation avec le corps enseignant ?

Les relations avec les enseignants ont été plus ou moins « bénéfiques ». Moi qui en tant que maman d’enfant en situation de handicap suis plutôt revendicatrice de l’inclusion de nos enfants en milieu ordinaire, j’ai dû beaucoup prendre sur moi pour ne pas agir avec impulsivité. En effet j’ai vite compris que les enseignants n’ont ni les moyens ni le temps de s’occuper d’enfants différents, pour cause de classe surchargée (même en privé), de programme surbooké, de manque de formation etc. J’ai alors après observation  compris qu’il valait mieux travailler en collaboration. Ceci a demandé quelques concessions, comme taire des idées divergentes, pour petit à petit amener son idée quand même. Il a fallu aussi apporter ses observations personnelles concernant l’enfant, et donc des idées d’adaptation qui ont parfois pris du temps (plusieurs semaines) avant d’être accepté par l’enseignant.

Je reste persuadée que des sensibilisations au niveau des enseignants seraient intéressantes, car si nous ne sommes pas formés à la base au handicap, ils ne le sont pas non plus. Après nous si on décide de faire ce métier d’AVS on a la capacité (ou pas, car j’ai rencontré des collègues qui malheureusement ne faisaient pas ce métier avec conviction) de faire des recherches personnelles au sujet du handicap, de  l’enfant (sa manière de vivre, ses repères, etc).

En tant que membre active dans l’association Cœurs à Choeur, ceci m’a permi de comprendre l’importance des sensibilisations, c’est pourquoi avec notre association nous allons dans les écoles avec nos enfants handicapés parler de la maladie, de leurs besoins, de leurs vies, leurs joies, leurs peines aux enfants comme aux enseignants.

Quels sont les avantages et les inconvénients de votre métier ?

Si le métier d’AVS est un magnifique métier, cela reste un métier très mal payé… C’est le tout premier inconvénient que j’aimerais mettre en avant, car je sais que beaucoup d’AVS arrêtent pour ces raisons là et c’est tout à fait légitime dans le contexte actuel. Ensuite pourquoi sommes-nous si mal payées ? Car justement nous ne sommes pas vraiment reconnus !! Cet inconvénient est à valeur égale que le fait d’être mal payé. Notre travail est parfois considéré comme du gardiennage… Heureusement pour ma part les enseignants ont toujours reconnus l’utilité d’une personne en plus pour s’occuper individuellement de l’enfant.

Un autre inconvénient majeur pour ma part pendant mes deux ans d’expérience est la manque d’informations sur le handicap de l’enfant.  C’est moi qui l’ai découvert, ai questionné les parents, etc.

Pour finir un gros point important, le manque de formation des AVS. Pour ma part je n’ai eu que 4 matinées dites d’informations. Il est dur aussi de suivre parfois un enfant une année, et de ne plus le suivre l’année prochaine on reste alors sur une sensation d’abandon … de non accomplis. Surtout quand il s’agit d’embauche sous forme de contrats CUI (d’insertion unique) où on ne peut pas faire plus de deux ans de suite.

Place aux avantages parce que OUI il y en a !!! C’est un très beau métier qui demande à se remettre souvent en question ! Le relationnel avec l’enfant permet une reconnaissance à travers l’affinité qu’on crée avec lui-même.

L’expérience auprès d’enfants différents est une réelle richesse… Bien que concernée, croyez moi que j’en suis ressortie encore plus riche. Je ne vous cache pas que la première fois que je me suis occupée du garçon à troubles de comportement je me suis pris une belle claque … Pensant connaître le handicap à travers mon quotidien je me suis dit « même pas peur » et finalement c’est avec étonnement que je me suis rendue compte que j’avais beaucoup à apprendre. En faisant progresser les enfants nous progressons aussi, dans notre vision du handicap, de la différence, de l’intégration, de l’inclusion. Accueillir un enfant handicapé dans une classe apporte beaucoup aux autres enfants aussi, il permet de les sensibiliser à la solidarité, à l’humanité.

Œuvrer pour l’acceptation du handicap en société est forcément avantageux humainement parlant.

Quelles sont vos joies au quotidien ? Votre meilleur souvenir ?

Les joies sont l’accueil, le sourire de l’enfant qu’il vous fait le matin, le réconfort qu’on peut lui apporter, les bons résultats qu’il peut avoir, les progrès ….

Mais mon meilleur souvenir n’est pas un moment précis mais plutôt l’aboutissement d’un travail fait avec l’enfant du début à la fin.

Je citerais donc en exemple mon parcours avec le petit garçon qui au début ne m’acceptait pas du tout. Il me rejetait à travers des mots durs, des insultes et des dessins très explicites. Après patiente et persévérance cet enfant a fini par m’accueillir à travers des sourires, des mots de gentillesse « merci d’être là » – « sans toi ce n’est pas pareil » …. Mon expérience de deux ans s’est terminée en février 2014, j’ai donc dû abandonner le petit garçon et la petite fille en milieu d’année à mon plus grand regret pour cause de contrat CUI qui arrivait à terme et qui ne pouvait être renouveler. La petite fille a eu une remplaçante mais le jeune garçon s’est trouvé sans AVS pendant les 6 mois restant de l’année… Quand j’ai à travers mon association Coeurs à Choeur fait un projet de sensibilisation dans cette école, j’ai revu le petit garçon… Quand il m’a revue son visage s’est illuminé par un beau sourire et il a couru vers moi… Lui qui avec des troubles du comportement a du mal à montrer ses sentiments a su le faire à ce moment précis. C’était pour moi un pas de gagner vers l’autonomie.

Quels conseils donneriez-vous aux personnes souhaitant exercer ce métier ?

Si j’avais des conseils à donner aux futurs AVS :

  • ne faites pas ce métier par remplacement d’un autre, si vous n’êtes pas motivé par le projet d’accueillir un enfant différent. Réfléchissez bien avant de vous engager,
  • faites un maximum de formation,
  • renseignez-vous sur la pathologie de l’enfant et sur internet grâce à des associations comme l’AFM, APF etc vous pouvez trouver des fiches « intégrascol » qui explique par exemple les difficultés d’un enfant atteint de tel ou tel handicap
  • dialoguez, établissez une relation de confiance avec l’enfant,
  • communiquez, démontrez à l’enseignant que vous pouvez avancer et souhaitez avancer « ensemble »,
  • restez patient, recommencez si ça n’a pas marché, remettez-vous en question,
  • communiquez avec les parents dans la mesure du possible,
  • sachez admettre que l’enfant ne peut pas arriver à tous les objectifs que vous mettez en place avec lui, renouvelez-vous,
  • acceptez l’échec,
  • observez beaucoup l’enfant pour apprendre à anticiper si nécessaire,
  • laissez-le aussi « vivre avec les autres »,
  • sachez prendre du recul.

J’aime tellement ce métier que malgré les nombreux inconvénients, j’ai décidé de renouveler un contrat avec l’Inspection Académique cette fois ci. Entretien en poche me voilà dans l’attente d’une affectation pour la rentrée dans un mois. Ce métier a su me remettre en question aussi sur l’intégration de mon enfant dans le milieu ordinaire qui aujourd’hui je peux le comprendre, n’est pas aussi simple que nous parents le souhaitons.

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