L’apprentissage des lacets est une compétence importante pour les enfants comme pour les parents. En effet, il s’agit d’une étape pour l’enfant lui permettant de gagner en autonomie et ainsi de favoriser le lien social : à la fois au niveau du quotidien (on met ses chaussures pour sortir de chez soi et aller vers l’autre, pour aller s’amuser avec ses amis, pour aller voir la famille…) et de la scolarité (on met ses chaussures en sport, après la piscine…). Quelle fierté une fois que l’on sait faire seul ses lacets ! Pour les parents, c’est également une étape clé : plus besoin d’aider son enfant à mettre ses chaussures le matin avant l’école, quel gain de temps !

Comme pour tout apprentissage, il faut que l’enfant soit prêt, cela demande du temps, d’être accompagné par une personne adulte et d’être adapté aux capacités de l’enfant. Découvrez les conseils de Tatiana BIZOT et Annabel ROY, ergothérapeutes, pour apprendre aux enfants à faire leurs lacets.

Un apprentissage complexe et multifactoriel

Faire ses lacets est un apprentissage qu’on apprend généralement vers l’âge de 6-7 ans, même s’il est souvent proposé dès la maternelle vers l’âge de 5 ans. C’est un apprentissage complexe et multifactoriel, il est donc normal que certains enfants prennent plus de temps ou aient plus de difficultés pour celui-ci.  Il est important de leur laisser du temps en amont pour acquérir certaines habiletés essentielles (afin qu’ils disposent de tous les prérequis pour que l’apprentissage des lacets puisse se faire plus sereinement) et ainsi éviter qu’ils se découragent.  

Plusieurs facteurs et prérequis pour commencer l’apprentissage des lacets

La motivation

Tout d’abord, le premier aspect à prendre en compte est évidemment l’aspect motivationnel puisqu’il s’agit d’un élément indispensable à tout nouvel apprentissage.  

Il existe deux types de motivation : la motivation intrinsèque et la motivation extrinsèque : 

  • La motivation intrinsèque est liée à l’envie d’apprendre, à la satisfaction qu’on en retire : “j’ai réussi à faire mes lacets seul” 
  • La motivation extrinsèque est liée au sentiment de devoir réaliser cette activité : pour faire plaisir aux parents, car les camarades le font… 

En ergothérapie, nous utilisons par exemple la MCRO (Mesure Canadienne du Rendement Occupationnel) ou l’OT’Hope (Outil d’autodétermination des objectifs en ergothérapie) afin d’identifier les occupations* importantes pour l’enfant et celles dans lesquelles il souhaite améliorer son rendement. Ce n’est qu’à ce moment-là que nous travaillerons l’apprentissage des lacets en séance. 

*Occupation : activité ou tâche à laquelle l’individu donne une valeur, une signification.

>> À lire aussi : « Apprendre à faire du vélo : les conseils d’une ergo »

Les habiletés de perception visuelle et d’analyse visuo-spatiale

Un deuxième prérequis attendu pour commencer l’apprentissage des lacets est d’avoir de bonnes habiletés de perception visuelle et d’analyse visuo-spatiale.  Il est nécessaire que les notions en lien avec le vocabulaire spatial soient acquises pour permettre à l’enfant de se représenter mentalement les gestes à effectuer (en dessous, devant, derrière, par-dessus, etc.). 

Mais il est également nécessaire de comprendre et percevoir les mouvements (plier, enrouler autour, tirer, serrer, etc.), les positions des lacets, les grandeurs des boucles… 

Les habiletés motrices

Pour l’apprentissage des lacets, il est également important que certains prérequis de motricité fine soient acquis. Par exemple, il est nécessaire que l’enfant ait des capacités de dissociation digitale suffisante pour qu’il puisse réaliser une opposition du pouce avec chacun de ses autres doigts sans regarder sa main. 

En lien avec les habiletés visuo-spatiales, l’enfant doit également pouvoir se faire une représentation mentale et exécuter les mouvements tels que plier, enrouler autour, tirer, serrer… 

>> À télécharger aussi : « Le parcours de motricité fine ».

Les habiletés opératoires

L’apprentissage des lacets sollicite également des processus cognitifs complexes : les fonctions exécutives. Elles interviennent dans la régulation des pensées, des émotions et des comportements et permettent à l’enfant d’agir de façon organisée et de planifier une suite d’actions afin d’atteindre les objectifs qu’il se fixe.  

Faire ses lacets est une tâche avec différentes étapes à respecter. Si la notion de planification est encore difficile pour l’enfant, il est possible de l’aider en lui proposant un support visuel reprenant la succession d’étapes à effectuer pour faire ses lacets. 

>> À lire aussi : « Neurosciences et fonctions exécutives »

Quelques conseils pour les parents

Dès que l’enfant montre de l’intérêt pour apprendre à faire ses lacets seul : il est important d’accompagner cet apprentissage : 

  • En l’associant à un aspect ludique pour lui donner envie d’apprendre 
  • En décomposant les étapes et en prenant le temps :  
    • Il est possible de seulement lui monter dans un premier temps puis de l’inclure au fur et à mesure dans la réalisation des gestes. 
    • Il est possible de proposer à l’enfant un visuel afin de l’aider à se rappeler et à se situer dans les étapes à effectuer.
  • On peut aussi proposer des jeux de manipulations de petits objets afin d’accompagner le développement de la motricité fine et solliciter la coordination bimanuelle.
  • En tenant compte du rythme de l’enfant : logiquement cette étape vient après l’habillage, mais il est possible aussi de sensibiliser l’enfant avant s’il montre de l’intérêt pour apprendre à attacher ses chaussures. 
  • En l’encourageant à planifier certaines tâches de son quotidien afin d’améliorer ses habiletés de planification et d’organisation.
  • On peut également valoriser ses compétences et ses progrès afin de stimuler sa confiance en lui.

3 techniques d’apprentissage

Plusieurs étapes peuvent être nécessaires pour apprendre à faire ses lacets : 

  • Apprendre à lacer : savoir enfiler un lacet à travers les trous des chaussures 
  • Savoir faire le premier nœud simple avant les boucles 
  • Apprendre à faire les lacets grâce à une histoire  
  • Apprendre à faire seul les lacets sans l’histoire 
  • Transférer à la maison et avec d’autres lacets / chaussures 

Il est important d’apprendre rapidement avec les vraies chaussures et dans la position dans laquelle l’enfant devra faire ses lacets afin de travailler en situation réelle dans son environnement. Plusieurs techniques existent afin de décomposer les étapes à effectuer et leur donner plus de sens afin d’aider l’enfant dans cet apprentissage. Il s’agit donc d’associer une histoire mettant en scène des animaux à des gestes moteurs. Il existe pour cela plusieurs histoires et de nombreuses variantes, il est important de choisir celle qui correspond aux capacités de l’enfant et à ce qu’il aime. C’est encore mieux si vous adaptez l’histoire en fonction de ses goûts ! 

Le serpent

Chantez la comptine sur l’air de « Savez-vous planter les choux ».

https://www.toupie-magazine.com/tiloulou/les-comptines-de-tiloulou/lacets-tiloulou

Les oreilles de lapin

Source : https://evolutionclasse.org/2018/01/17/fiche-tuto-attacher-ses-lacets-avec-la-methode-des-oreilles-de-lapin/

La Chenille et le Papillon

http://ergo.scolaire.free.fr/positionnement_menu.htm

Les enfants aux besoins spécifiques et l’apprentissage des lacets

L’ergothérapeute est le professionnel de santé spécialiste du quotidien, il fonde sa pratique sur l’amélioration de l’autonomie dans les activités/occupations de la vie quotidienne, scolaires et de loisirs. Il va intervenir dès qu’une difficulté impacte le quotidien de l’enfant et son autonomie (on parle d’impact sur la performance occupationnelle de l’enfant). 

Une limitation de cette performance dans une occupation comme faire ses lacets est donc une problématique qui peut-être travaillée en séance d’ergothérapie. D’autant plus que l’ergothérapeute base son intervention sur l’interaction entre l’enfant (sa motivation, ses envies, ses besoins), ses habiletés, l’activité/l’occupation et son environnement. Tous ces éléments, comme on l’a vu précédemment, sont essentiels à l’apprentissage des lacets. 

Même s’il s’agit rarement du motif principal de consultation, la difficulté à apprendre à faire ses lacets fait fréquemment partie des problématiques des enfants que nous accompagnons en ergothérapie.  

Cette difficulté peut être isolée (le développement des enfants n’étant pas linéaire, certains enfants auront besoin de passer davantage de temps sur certaines “compétences” !), mais elle peut également s’inclure dans un contexte de difficultés dans les nouveaux apprentissages moteurs (habillage, coordination pour attraper une balle, vélo…).  

Il convient de garder un œil attentif sur les éventuelles résistances de l’enfant à entrer dans de nouveaux apprentissages moteurs.  Si les difficultés perdurent, vous pouvez vous orienter vers un professionnel de santé spécialiste du développement de l’enfant : notamment les ergothérapeutes (qui pourront identifier et agir sur les difficultés rencontrées dans la vie quotidienne / scolaire / loisirs et leurs causes), mais également les psychomotriciens, les psychologues 

De jeunes enfants apprennent les nombres avec leur enseignante de maternelle.

>> À lire aussi : « L’ergothérapie expliquée par les ergos ».

L’accompagnement en ergothérapie

L’ergothérapeute pourra lors des séances analyser et agir : 

  • Sur l’enfant : analyser ses habiletés motrices, visuelles, cognitives, la routine dans laquelle il réalise cette activité, la perception qu’il a de son rendement...
  • Sur l’activité : analyser la manière dont l’enfant réalise l’activité et l’adapter en fonction de ses capacités et besoins 
  • Et sur l’environnement : analyser l’environnement matériel dans lequel l’enfant réalise l’activité (comment sont ses lacets, ses chaussures, le lieu, la chaise…) et le modifier si nécessaire pour le rendre facilitateur.

Il va prendre en compte tous les éléments qui vont agir sur la réalisation de l’activité afin d’accompagner l’enfant dans l’apprentissage des lacets.

Par exemple : 

  • On peut créer des aides visuelles adaptées au besoin de l’enfant.
  • En accompagnant l’enfant à découvrir et utiliser ses propres stratégies cognitives à l’aide de la méthode CO-OP (Cognitive Orientation to daily Occupational Performance, méthode développée par une équipe de recherche en ergothérapie canadienne).
  • En proposant du matériel adapté : en effet lorsque l’apprentissage des lacets est difficile et dure dans le temps, il peut être souhaitable de proposer à l’enfant du matériel adapté afin qu’il ne se trouve pas en situation d’échec dès lors qu’il doit mettre ou enlever ses chaussures. L’ergothérapeute adapte alors l’environnement de l’enfant pour pallier ses difficultés. Pour cela, il existe par exemple des chaussures à scratch (mais elles ne vont généralement que jusqu’à une certaine pointure !), des lacets élastiques ou encore des lacets de couleurs différentes. 

Conseils de jeux

Afin d’accompagner cet apprentissage, vous pouvez proposer plusieurs jeux ou activités à l’enfant. Les jeux présentés sollicitent les prérequis évoqués précédemment afin de renforcer les capacités visuo-spatiales, la motricité fine et/ou les fonctions exécutives et permettent pour certains d’aborder les lacets sous une forme détournée et ludique. 

Poupée gigognes : 6 jolies poupées de tailles différentes se rangeant les unes dans les autres comme des poupées russes. Chacune d’elles propose un type d’attache que l’enfant retrouve sur ses vêtements (lacet, bouton…) développant ainsi la motricité fine et l’autonomie.

Laçages formes géométriques : 3 beaux cadres en bois avec une surface en plexi coloré transparent percé ici et là pour des heures de jeux de laçage. Très maniables, ces cadres permettent aussi une exploration de la lumière dans une optique Reggio. Livrés avec des modèles de laçage à réaliser et des lacets de différentes couleurs.

Dessins à lacer : Créez des dessins en relief à l’aide d’un stylet et de cordons colorés ! Ce jeu permet de préparer au graphisme en développant la coordination œil-main et la motricité fine.

 


Annabel Roy- Ergothérapeute

Annabel ROY, diplômée en 2012 de l’IFE de Rennes, est ergothérapeute libérale spécialisée en pédiatrie et en gériatrie à Bagneux (92). Elle détient également un DU en réhabilitation neuropsychologique de l’université de la Sorbonne.

Pour la retrouver : @annabel.ergo sur Instagram / Site internet : cabinetdergotherapieroy.fr

 

 

Tatiana BIZOT, diplômée en 2013 de la Haute Ecole Léonard de Vinci de Bruxelles, est ergothérapeute libérale spécialisée en pédiatrie au Plessis-Robinson (92), après un parcours hospitalier essentiellement orienté en pédopsychiatrie et psychiatrie adulte. 

Pour la retrouver  : @tatiana.ergo sur Instagram / Site internet : www.ergo-bizot.com  

 

Alexandra, chargée de communication.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Taper la réponse pour valider votre commentaire * Time limit is exhausted. Please reload the CAPTCHA.