Chiens, chats, cochons d’Inde, chevaux ou même bouc ! Et si nos amis les bêtes pouvaient favoriser notre bien-être physique et psychologique ? La médiation par l’animal est une thérapie non-médicamenteuse qui fait ses preuves ! Elle s’est d’abord développée dans les EHPAD et poursuit son essor, notamment dans les établissements accueillant des personnes en situation de handicap. Ombeline est psychomotricienne, elle exerce en EHPAD et s’est formée à la médiation animale. Dans cet article, elle nous explique cette approche et la façon dont elle la met en œuvre auprès des occupants de l’EHPAD dans lequel elle exerce.

Qu’est-ce que la médiation par l’animal  ?

La médiation par l’animal est un soin alternatif non médicamenteux. Il se pratique en individuel avec un patient, ou un tout petit groupe de 3 patients maximums. À l’aide d’un animal médiateur et familier dans l’environnement immédiat de la personne, nous cherchons alors à éveiller des réactions visant à maintenir ou à améliorer leur potentiel cognitif, physique, psychosocial ou affectif. La médiation par l’animal se différencie des autres médiations par l’introduction d’un être vivant et sensible.

Le rôle de l’animal

La médiation par l’animal se décompose en différentes thématiques, répondant à des objectifs précis et orientant vers des ateliers spécifiques. Il est important de rappeler que la médiation par l’animal n’est pas une médecine, elle ne guérit pas, mais vient en complément. En aucun cas l’animal est une solution qui va résoudre tous les problèmes et ce n’est pas parce qu’on aime les animaux ou que l’on a un chien que nous pouvons faire de la zoothérapie.

De plus, l’animal n’est pas le thérapeute, ce n’est ni une machine, ni un objet. L’animal a une âme, une sensibilité, une volonté, une fragilité et un langage qui lui est propre selon son espèce. L’animal va venir soutenir en tant que médiateur la pratique du professionnel. Nous observons alors une triangulation entre ces 3 entités : le pilote étant le professionnel qui va aider le patient à atteindre les objectifs ciblés et ce, à l’aide de l’animal dont il doit avoir une bonne connaissance. 

Rox le Grand Bouvier suisse

Rox : Grand Bouvier Suisse né le 20/11/2020

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Les bienfaits et objectifs de la médiation par l’animal

Les séances de médiation par l’animal permettent aux personnes d’être dans une participation active, en étant en contact avec des êtres vivants et sensibles : les animaux. Les personnes se sentiront utiles, car elles auront pour rôle de prendre soin de quelqu’un. Outre le fait de solliciter les capacités physiques et psychiques des individus, l’apport de l’animal est apaisant et donne une sensation de bien-être. 

À qui s’adresse la médiation par l’animal

Les thérapies classiques ont leurs limites avec les personnes qui n’ont parfois plus accès au langage, qui sont très repliées sur elles-mêmes, ou qui expriment une agressivité. L’animal va être un médiateur très apprécié pour passer par des canaux de communication moins conventionnels. Il fait tomber des barrières sociales, psychologiques, qui vont permettre d’aller plus facilement à la rencontre de la personne et de ses difficultés. L’animal joue très facilement un rôle de meilleur ami, il peut être accélérateur de mise en confiance. L’animal ne juge pas et renvoie des signes de revalorisation et redonne de la confiance à la personne de manière indirecte. 

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Les apports de l’animal dans la thérapie

L’animal va venir soutenir le thérapeute pour l’aider à créer un lien, qui facilitera le travail sur le relationnel, l’affectif et le cognitif. L’animal joue le rôle de médiateur, il se positionne entre le patient et le thérapeute. Le patient va parfois s’adresser en premier à l’animal, puis se tourner vers le thérapeute. La personne va même parfois se confier à l’animal tout en sachant que le thérapeute est là. L’animal agit alors comme un agent transitionnel. La présence d’un animal favorise la concentration en temporisant l’interaction et en diminuant les parasites. L’animal permet de responsabiliser la personne à son niveau, ce qui l’aidera à retrouver une image plus positive d’elle-même et un sentiment d’utilité. Grâce à l’animal, nous pourrons travailler autrement l’orientation et les repères spatio-temporels, la mémoire, les praxies, les coordinations et dissociations, le schéma corporel, l’image du corps, le tonus, l’anxiété, l’angoisse, stimulation sensorielle, sensori-motrice et sensori-affective. L’animal introduit de l’humour et de la souplesse dans des interactions parfois trop sérieuse et rébarbatives. L’animal permet de découvrir la personne autrement. Il touche directement à l’affectivité. 

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D’une manière générale, la présence d’un animal permet, en favorisant la créativité du thérapeute, de construire de « nouvelles réalités » pour le patient. L’animal apporte un potentiel de changement important dans une relation thérapeutique. Il ouvre de nouvelles perceptives, sur la base de modalités de communications différentes.  

Teddy le cochon d'inde

Teddy : cochon d’inde US- né le 04/05/2021

La médiation par l’animal en gériatrie  

En gériatrie, le travail du psychomotricien avec la personne âgée est d’accompagner cette dernière dans l’acceptation des pertes corporelles et psychiques, par une revalorisation des compétences restantes. Le psychomotricien accompagne et aide les personnes confrontées à des difficultés psychologiques exprimées par le corps en utilisant des médiations. L’objectif est de réconcilier la personne avec son corps, à lui procurer une aisance gestuelle et à lui faire retrouver une sensation de bien-être physique et psychique. En somme, à retrouver un équilibre psychocorporel. L’espace de soin en psychomotricité se doit d’être ludique et adapté à la personne afin que le plaisir trouve sa place. 

Les médiations sont nombreuses : expression corporelle ou plastique, jeux sensorimoteurs, activités d’équilibrations, de coordinations, jeux de stratégie, relaxation psychosomatique et dynamique, toucher thérapeutique… Ainsi que la médiation par l’animal lorsque le psychomotricien est formé pour cette dernière. Cette médiation se différencie des autres par l’introduction d’un être vivant et sensible. 

Les objectifs de la médiation par l’animal

La médiation par l’animal va permettre d’établir une liste d’objectifs très variés.  

Cependant, les objectifs vont différer en fonction du projet thérapeutique de la personne :  

  • favoriser une régulation tonico-émotionnelle 
  • favoriser un bien être psycho-corporel 
  • contribuer à la gestion des troubles du comportement (notamment lors des soins de nursing difficile) 
  • stimulation sensorielle et cognitive 
  • évaluation et stimulation des praxies, gnosies, coordinations et dissociations 
  • stimulation motrice 
  • (ré)intégration du schéma corporel 
  • favoriser une meilleure estime de soi/image du corps 
  • réduire/limiter l’anxiété et/ou l’angoisse 
  • favoriser l’expression et la gestion des émotions 
  • lutter contre l’isolement social, créer du lien 
  • stimuler la communication et les interactions 

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L’organisation des séances

Après avoir ciblé les résidents en équipe en fonction de leur intérêt pour les animaux, mais aussi de leur pathologie et besoins, nous établirons des groupes de 3 personnes au maximum et des séances individuelles lorsque cela est plus adapté pour la personne.  

Le temps de la séance 

Il est important que l’animal puisse avoir des temps de repos. L’animal ne travaillera jamais pendant toute une séance entière. Il n’excédera pas 10 minutes de travail. Après 10 minutes de présence auprès d’un résident, l’animal ira prendre une pause et revenir par la suite en fonction de son bien-être. De plus, il est important de préciser qu’une personne âgée ne peut faire l’objet d’une attention soutenue pendant une durée supérieure à 20 minutes. Des temps de pause sont donc essentiel pour tout le monde. Les premières séances sont destinées à observer et définir les objectifs en fonction du projet thérapeutique du résident. 

Préparation des séances

Les séances sont préparées en amont : 

  • choisir les exercices, les jeux qui seront proposés aux résidents et animaux et dans quels buts 
  • préparer le matériel nécessaire 
  • penser à proposer quelque chose de nouveau pour surprendre les participants 

Temps d’adaptation et d’observation

Au début de la séance, il faut établir une prise de contact avec le résident, c’est-à-dire que chacun puisse se saluer : bonjour au résident, à bonjour de l’animal au résident, à bonjour du résident à l’animal. Ce premier instant est crucial pour avoir un premier constat de l’intérêt de cette médiation auprès de la personne. Nous allons observer sa motivation pour participer à la séance, son regard, l’intérêt porté à l’animal et la mémorisation (si la personne a déjà réalisé des séances : le nom de l’animal par exemple).  Puis la séance est rythmée de moments de jeux et de partages avec les animaux. Puis des moments de jeux sans l’animal mais en utilisant des supports en lien avec les animaux. 

Chaque fin de séance doit faire l’objet de rédaction de fiches de suivi. Il est important d’établir des rapports réguliers pour faire état des activités menées dans le cadre de la mise en place du projet médiation par l’animal. Aussi, il est essentiel de prendre un temps avec le personnel de l’établissement pour faire le point sur l’évolution des résidents participants aux séances de médiation par l’animal.  

Espoir le cochon d'inde femelle

Espoir : cochon d’inde femelle rosette, née le 09/09/2017

Cas pratique : exemple d’une séance avec Monsieur Sourire

Le nom a été modifié afin de respecter le secret professionnel. Monsieur Sourire est âgé de 87 ans. Il a eu, il y a 4 ans, un Accident Vasculaire Cérébral ischémique. Il présente une hémiplégie gauche partielle, quelques légers mouvements sont possibles. Concernant son hémicorps droit, Monsieur Sourire est limité dans ses mouvements, il présente de nombreuses raideurs musculaires mais, il est malgré tout capable de réaliser quelques mouvements. 

Monsieur Sourire est en fauteuil roulant, il mange en autonomie et a besoin d’une aide complète pour les soins d’hygiène. Monsieur Sourire échange facilement (mais se fatigue très vite), il aime raconter son histoire de vie, il évoque beaucoup ses souvenirs avec énormément d’émotions. C’est un homme très sensible qui ne supporte pas son image corporelle. Il se dénigre beaucoup et se sent inutile. 

Les objectifs de Monsieur Sourire au sein du groupe médiation par l’animal sont : 

  • favoriser un bien être psycho-corporel 
  • encourager une meilleure estime de soi/image du corps 
  • favoriser l’expression et la gestion des émotions s
  • stimulation motrice 
  • lutter contre l’isolement social, créer du lien 

Déroulé de la séance

Monsieur Sourire reste toujours au contact du chien. Il dit ne pas vouloir porter ou caresser un lapin de peur de lui faire du mal avec les mouvements de raideurs éventuels. Pendant la séance, il saisit la balle en mousse pour la lancer au chien. Il est heureux de voir que l’animal fait attention à lui et lui rapporte la balle. Il va ensuite préparer le jeu d’intelligence pour le chien afin de le récompenser. Nous lui apportons la plateforme face à lui et nous mettons les friandises à sa gauche afin de travailler l’héminégligence. Monsieur Sourire parvient à saisir les friandises et à les insérer dans l’espace attendu. Cela lui demande beaucoup d’effort et de temps. Une fois la préparation terminée, le chien monte de nouveau sur la table et commence le jeu d’intelligence. Il observe, sourit, rigole et semble heureux de voir le chien savourer ses friandises. 

Des exemples de jeux avec l’animal

Une fois les jeux et moments réalisés avec les animaux. Nous passons à la dernière étape de la séance. On va alors lui proposer des jeux que nous adaptons toujours en fonction des capacités et objectifs des résidents.   

Nous pouvons retrouver comme jeux : memory avec photos des animaux mais aussi du matériel, associer le prénom avec la photo des animaux, remettre les photos de l’animal dans l’ordre chronologique en fonction de l’âge, texte en lien avec l’animal, domino, lynx, 7 différences, puzzle, tissage de laine, charade, rebus, photo langage, loto sensoriel, boite à toucher, écriture du prénom des animaux. 

Fin de séance

Chaque résident dit au revoir aux animaux, par une caresse, un mot ou un regard. Nous prenons ensuite le temps d’écouter les verbalisations et ressentis de chaque résident. Nous pouvons demander de donner une émotion, un sentiment ou même de reproduire un dessin signifiant l’état du moment. Chaque proposition sera adaptée en fonction des capacités de la personne. 

 

Le respect de l’animal

Le temps de travail pour l’animal va varier en fonction de l’espèce de celui-ci, des jeux et exercices que nous allons proposer et surtout, cela dépendra du caractère de notre animal. Ce n’est pas parce qu’un chien à une capacité de travail de 10 minutes que cela sera le cas pour un autre chien. Il est important de connaitre son animal. Nous devons nous adapter au rythme de notre animal et non l’inverse. Nous devons respecter son rythme afin de respecter sa santé, son bien-être (le burn-out n’existe pas que chez l’humain !). Il faut veiller à ce que l’animal prenne du plaisir et accepter qu’il refuse parfois d’aller au contact d’une personne. Cela signifie certainement qu’il se sent en danger. Et au contraire, quand l’animal souhaite aller au contact d’une personne présentant de l’agressivité, c’est qu’il sent avec son flair que derrière cette agressivité se cache de la souffrance. 

Après chaque séance de médiation, il est important de donner des pauses à notre animal, à aller le promener, jouer un petit peu avec lui. L’animal sait se défaire de ses tensions internes à conditions de lui en laisser l’espace et le temps. Aussi, il est essentiel de féliciter notre animal, lui dire qu’il a bien travaillé et de le remercier. 

Si vous ou l’un de vos proches, pratiquez la médiation par l’animal, n’hésitez pas à nous raconter votre expérience dans les commentaires.

Sources :

François Beiger. (2020, 2ème édition). Éduquer avec les animaux. 

François Beiger et Gaëlle Dibou. (2019). La zoothérapie auprès des personnes âgées, une pratique professionnelle.
Publié le 29/07/2022 mis à jour le 03/10/2023.

 


Ombeline psychomotricienne

Bio 

Je suis Ombeline, psychomotricienne, j’exerce en libéral et en EHPAD depuis l’obtention de mon diplôme en 2018. J’ai décidé de me former à la médiation par l’animal en avril 2021 au sein de l’Institut Français de Zoothérapie. 

Pour me suivre sur les réseaux sociaux : sur Facebook :  Ombeline psychomot and co et Instagram : psychomot_and_co 

 

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