Chaque année, en France 1 500 enfants sont victimes de paralysie cérébrale. La journée mondiale consacrée à cette pathologie, le 6 octobre, est l’occasion de faire le point sur une affection peu connue, dont les conséquences peuvent être très différentes d’un patient à l’autre.

Qu’est-ce que la paralysie cérébrale ?

La paralysie cérébrale est définie comme un ensemble de troubles permanents du mouvement et/ou de la posture, dont l’expression clinique peut changer au fil du temps.

Cette définition est cependant remise en question, car elle ne procure qu’une vision partielle des difficultés potentiellement rencontrées par les personnes atteintes de paralysie cérébrale. Leur handicap moteur est en effet souvent composé d’autres déficiences, et les symptômes peuvent varier grandement d’un individu à l’autre. Certains patients sont atteints de polyhandicap, tandis que d’autres peuvent avoir qu’une gêne « légère » lorsqu’ils marchent.

Le seul véritable point commun est que ces troubles résultent toujours d’un désordre, d’une lésion ou d’une anomalie non progressive survenue dans un cerveau immature ou en cours de développement. Autrement dit, le cerveau des enfants a été lésé avant, pendant ou après la naissance.

À l’origine de la paralysie cérébrale, une lésion précoce

Les troubles moteurs permanents qui affectent les patients atteints de paralysie cérébrale résultent d’une lésion cérébrale dont les caractéristiques sont d’être non progressive et de s’être produite précocément.

En fonction du stade de développement du cerveau au moment où survient la lésion, on distingue trois types de lésions. Les malformations cérébrales, qui touchent 9 % des enfants avec paralysie cérébrale. Elles résultent d’une anomalie se produisant durant la formation du cerveau, en première partie de grossesse. Les lésions périventriculaires de la substance blanche, qui concernent 56 % des enfants avec paralysie cérébrale. Elles découlent de problèmes survenus au début du troisième trimestre de grossesse, souvent en lien avec la prématurité. Enfin, dans 18 % des cas, les atteintes concernent le cortex et/ou les noyaux gris centraux, en raison de lésions intervenues en fin de grossesse ou en période péri- ou postnatale.

Les lésions qui surviennent avant la naissance résultent souvent d’anomalies chromosomiques ou génétiques, d’infections materno-fœtale (toxoplasmose, rubéole, cytomégalovirus, herpès…), ou de problème inflammatoire ou placentaire. Au moment de l’accouchement et jusqu’au 28e jour de vie, les problèmes qui occasionnent des lésions sont généralement dus à un ictère nucléaire, une asphyxie périnatale, des infections. Les prématurés sont plus à risque. Ensuite entre le 28e jour de vie et jusqu’à 2 ans, les infections telles que les méningites, un traumatisme crânien (notamment « bébé secoué »), ou des problèmes vasculaires (AVC) sont en cause.

Il faut cependant souligner que ces anomalies structurales du cerveau ne sont pas systématiquement mises en évidence chez les enfants avec paralysie cérébrale : 10 à 15 % des IRMs réalisées fournissent des résultats normaux, ou ne révèlent pas de signes en lien évident avec l’affection. Les troubles moteurs seraient alors liés à une dysfonction dans les réseaux neuronaux sensorimoteurs, impliqués dans les fonctions sensorielles et la motricité.

>> À télécharger : L’AVC de l’enfant en une infographie

Au-delà des troubles moteurs, d’autres déficiences

L’étendue, la taille, la localisation et le moment de survenue de la lésion cérébrale influencent la plasticité cérébrale (capacité du cerveau fabriquer de nouvelles connexions neuronales, en fonction des apprentissages, des expériences). Le tableau clinique de la paralysie cérébrale change en conséquence, ce qui explique son hétérogénéité.

Le trouble moteur de la paralysie cérébrale peut être complété par d’autres déficiences comme des difficultés sensitives, sensorielles, cognitives, de la communication et du comportement, ainsi que d’épilepsie et de complications musculo-squelettiques secondaires.

Le caractère non progressif de la lésion ou de l’anomalie cérébrale ne signifie pas que la situation clinique des enfants reste stable. Chez un individu en développement et en pleine croissance, le trouble de la commande motrice et les autres troubles peuvent entraîner de nombreuses déformations musculo-squelettiques : déformations articulaires, scolioses, luxation de hanches… On sait également que plus la déficience motrice est sévère, plus le risque d’autre déficience (cognitive, visuelle, auditive…) est important.

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Comment diagnostique-t-on la paralysie cérébrale ?

Le diagnostic de la paralysie cérébrale est souvent posé durant la première année suivant la naissance. Constatant un trouble de la motricité, le clinicien vérifie si l’histoire médicale de l’enfant est compatible avec la pathologie. Théoriquement, le diagnostic ne peut cependant être confirmé qu’à partir de 4 ans. L’imagerie cérébrale n’est pas nécessaire, mais s’avère d’importance en pratique clinique, notamment pour comprendre la cause. Néanmoins, comme nous l’avons vu, une IRM normale ne peut suffire à exclure le diagnostic de paralysie cérébrale.

En fonction des difficultés motrices rencontrées, la clinique distingue plusieurs types de formes de paralysie cérébrale (spastique – unilatérale ou bilatérale), dyskinétique, ataxique, mixte). Cette description ne permet toutefois pas d’évaluer ce qu’est capable de réaliser l’enfant touché ni identifier a priori ses besoins. Pour cette raison, une approche basée sur les concepts d’incapacité et de limitation d’activité est nécessaire, afin et de mieux qualifier les troubles présentés par les enfants atteints de paralysie cérébrale.

Diverses classifications, complémentaires les unes par rapport aux autres, ont été établies dans le but d’instaurer un langage commun entre les praticiens et les familles. Permettant une description rapide et reproductible des capacités fonctionnelles de l’enfant, l’échelle Gross Motor Function Classification System (GMFCS – système de classification de la fonction motrice globale) mérite d’être citée ici.

De récentes études montrent que la prévalence de la paralysie cérébrale a diminué de 0,5 naissances pour 1000 entre 1995 et 2009, grâce aux progrès en soins obstétricaux et néonataux.

Cette bonne nouvelle ne doit cependant pas faire oublier l’importance de la prise en charge multidisciplinaire des enfants touchés. Ceux-ci vont grandir, et devenir des adultes dont les besoins pourront évoluer. Pour mieux les suivre, les pouvoirs publics doivent faire de la paralysie cérébrale une priorité, en termes de recherche, de prise en charge et d’accompagnement.The Conversation


 

Stéphane Chabrier s’intéresse aux AVC de l’enfant depuis son internat réalisé en grande partie à l’hôpital Bicêtre auprès des Prs Lasjaunias, Landrieu, Tardieu et Sébire, figures historiques de la recherche et du soin sur cette pathologie en France.
Il passe sa thèse en 1998 : « infarctus cérébral artériel de l’enfant : étude clinique, étiologique et évolutive à partir d’une population de 59 enfants ».

M. Chabrier est depuis médecin pédiatre au CHU de Saint-Etienne et a publié de nombreux articles originaux, mises au point et recommandations pour la pratique clinique sur le thème. Il est par ailleurs membre de la Société française de neurologie pédiatrique.

Depuis janvier 2018, Stéphane CHABRIER est coordonnateur de la recherche au Centre national de référence de l’AVC de l’enfant et le responsable médical de la réunion de concertation pluridisciplinaire (RCP).

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