Nous connaissons tous les 5 sens : la vue, l’odorat, l’ouïe, le goût et le toucher. Par divers stimuli extérieurs, ils nous permettent de découvrir le monde qui nous entoure et de prendre des décisions. On connait aussi le système vestibulaire, qui régit le sens du mouvement et de l’équilibre. Puis, à travers la lecture de nos articles, vous avez sans doute pu prendre connaissance de ce qu’était la proprioception. Cette notion, un peu technique définie la perception de soi dans l’espace. Elle est souvent évoquée lorsque l’on aborde des sujets concernant le développement de la motricité, notamment. Mais, quand les messages nous proviennent de l’intérieur, de quoi s’agit-il ? On parle d’intéroception. C’est notre 8e sens et on vous l’explique dans cet article ! 

Prendre conscience de son corps

La sensibilité du corps est composée de 3 systèmes :

  • L’extéroception représente les sensations provoquées par des stimuli venant de l’extérieur. Elle fait appel au 5 sens, que nous connaissons tous. La vue, l’odorat, l’ouïe, le goût et le toucher.
  • La proprioception ou sens proprioceptif, est la perception consciente ou inconsciente des différentes parties de notre corps. Elle repose sur des récepteurs musculaires, des articulations ou des os. Grâce à ces récepteurs, il est possible de connaitre la position et les mouvements de son corps sans avoir à les regarder.
  • L’intéroception, c’est la perception des sensations corporelles et de l’état interne du corps. Elle repose sur la perception des signaux en provenance des viscères, comme le cœur et le système gastro-intestinal d’une part, mais aussi des systèmes respiratoires et urinaires. La sensation de vessie pleine qui nous alerte qu’il faut aller au toilettes, par exemple. Ou encore, les sensations de faim qui se manifeste avec des gargouillis, les frissons quand on a froid ou la chaire de poule pour exprimer la peur ou le bonheur. Quand tout fonctionne bien, notre corps nous renvoie tous ces signes pour exprimer des émotions et nous permettre de prendre des décisions.

Les chercheurs et les cliniciens reconnaissent l’intéroception comme un mécanisme clé de la santé mentale et physique, où la compréhension des signaux de notre corps nous aide à comprendre et à réguler les états émotionnels et physiques.

Dr Helen Weng

À cela, s’ajoute le sens vestibulaire, qui régit le sens du mouvement et de l’équilibre et qui nous permet de situer notre corps dans l’espace. Ensemble, ils forment les 8 sens qui composent notre sensorialité. Tous ces systèmes servent à transmettre des messages à notre cerveau.

Une caractéristique commune chez les TSA

L’intéroception nous renseigne sur les émotions, la douleur, la soif, la faim et la température corporelle ou la fréquence cardiaque. Les personnes TSA ont une perception sensorielle différente et présentent souvent un déficit de l’intéroception. Le sens de la perception de leur corps est altéré. Ils éprouvent, notamment, des difficultés à différencier et interpréter les informations en provenance du corps. Ils sont souvent dans l’incapacité de sélectionner des informations sensorielles pertinentes de celles qui le sont moins1. En d’autres termes, une personne avec autisme peut ne pas ressentir de la douleur ou de la faim. Une démangeaison pourra être perçue comme douloureuse ou alors, la personne TSA pourra ressentir des chatouillis à la place de ressentir de la douleur.

Le déficit d’intéroception peut aussi affecter l’interprétation des émotions.  Si une émotion peut ne pas être « ressentie », elle peut affecter le comportement de la personne. De la même façon, si une personne ne reconnaît pas les signaux de la faim ou de la soif, elle peut ne pas se nourrir ou se déshydrater. Parfois aussi, cela peut expliquer pourquoi un enfant peut être incontinent. Il ne ressent pas les signaux de sa vessie pleine et l’inconfort.

Pour certaines personnes les signaux corporels peuvent être ressentis de manière très intense alors que pour d’autres ils seront plus atténués voire inexistants. Des signaux corporels peu clairs rendent difficiles l’identification exacte de ce qui est ressentis et peuvent ainsi impacter sur la régulation des émotions.

Intéroception - stimulation sensorielle

Quelles solutions pour développer l’intéroception

Lorsque le sens intéroceptif est altéré, il affecte aussi la capacité d’autorégulation. Avant toute chose, il est important d’identifier la cause de telle ou telle réponse. Pourquoi mon enfant réagit-il ainsi ? Pourquoi a-t-il cette réaction ? La cause est parfois ailleurs, comme en témoigne ces deux expériences2 :

Je me souviens que mon amie, m’a parlé d’une fillette de 9 ans qui ne cessait de se cogner la tête. Elle avait même besoin d’un casque pour se protéger la tête. En fait, elle avait des poux et personne ne les avaient détectés. Une fois que cela a été résolu, la fillette a arrêté de se cogner la tête.

Une fois, ma fille TSA s’est arrachée les cheveux tout autour d’une oreille. Plus tard, on lui a diagnostiqué une infection de l’oreille. Elle n’avait jamais pleuré et ne s’était jamais plainte de la douleur.

Pour être en mesure de réguler nos comportements, il est important de prendre conscience de notre état interne. Et pour faciliter la prise de conscience de ce qui se passe à l’intérieur de notre corps, il est possible de mettre en place un certain nombre de choses :

Mettre des mots sur les émotions

Cela peut se faire par un accompagnement ou en utilisant un outils de type roue des émotions. Cette roue permet d’aider les enfants et les adultes à prendre conscience de ce qu’ils ressentent (météo intérieure, sensations physiques…), à mettre des mots sur les émotions qui y correspondent et à exprimer leurs besoins.

Intéroception - la roue des émotion

>> À découvrir :  » Communiquer avec les roues à pictogrammes »

Mettre en place une diète sensorielle

En quoi consiste une diète sensorielle ? Quand un enfant avec des troubles du traitement sensoriel a du mal à filtrer l’information ou à ajuster son comportement, on pourra lui proposer une rééducation et/ou une stimulation sensorielle précise en fonction de son profil sensoriel. En général, la rééducation est réalisée par un ou une ergothérapeute formés à ce type d’approche. Une diète sensorielle doit être individualisée en fonction des besoins de chaque individu concerné.

>> En savoir plus sur la diète sensorielle

Pratiquer le Yoga

On peut aussi faire des exercices de pleine conscience, de respiration et de la méditation. Toutes ces techniques permettent de se concentrer sur ses sensations corporelles et sur sa respiration. Les exercices de respiration et la méditation consolident la conscience intéroceptive et améliorent ainsi l’image que l’on a de soi.

>> À lire : Gestion des émotions : le yoga source de bien-être 

L’intéroception est désormais au cœur des recherches en neurosciences3. Souvent assimilée au degré de conscience que l’on a de ce qui se passe dans notre corps, apprendre à la maîtriser pourrait participer à notre bien-être et permettrait de lutter contre certains troubles comportementaux. Qu’en pensez-vous ?

Source : 

1 Olga Bogdashina, Sensory perceptual issues in autism and Asperger syndrome, 2016

2 Maureen Bennie, What Is Interoception and How Does It Impact Those With Autism?, https://autismawarenesscentre.com, 07.03.2016

3 Moran Furman, Special Issue on Interoception, Trends in Neurosciences, s.d.

 

 

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Taper la réponse pour valider votre commentaire * Time limit is exhausted. Please reload the CAPTCHA.